LA POUPÉE ou Maman et la fin du monde, ZODIAK CHALLENGE de JANVIER

Publié le 7 Février 2019

 

 

Elle avait été heureuse.

Belle, elle était si belle. Avant. De longs cheveux blond pâle, ondulés, une frange nette surplombait de magnifiques yeux bleu ciel, bordés de cils outrageusement épais et recourbés. Ses sourcils étaient assez épais pour marquer un regard limpide et innocent. Un petit nez court et rond donnait un caractère poupin à son visage déjà enfantin. Ses joues marquées de rouge lui assuraient un air enjoué que sa bouche arrondie aux lèvres ourlées et fraîchement rose accentuait joliment. Ses bras encore potelés et ses petites mains fines aux ongles délicats ne demandaient qu'à être entourés de tendresse.

Elle avait longtemps été comblée. Entourée, cajolée, embrassée, serrée dans des bras aimants, baignée d'amour, couverte de cadeaux. Ses cheveux étaient brossés, lavés, peignés, coiffés, relevés de jolis colifichets. Elle portait les plus beaux habits qu'il se pouvait concevoir à sa taille délicate. Certains étaient même réalisés sur mesure. Les couleurs choisis assorties à ses yeux. Ses pieds portaient les meilleurs souliers conçus pour elle. Même ses vêtements de nuits se voulaient dignes de l'être exceptionnel qu'elle était.

Elle se voyait tenue avec tendresse, amour et considération. Nul ne lui portait atteinte, ne lui manquait de respect, ne songeait à la critiquer ou à l'ignorer. Sa  maman y veillait qui la serrait toujours contre son cœur en l'embrassant si tendrement.

Jusqu'au jour... où vinrent à manquer les nouveaux vêtements, les attentions, les soins, les gestes d'affection, jusqu'au moindre mouvement vers elle. Rien. Elle n'existait plus. Un bébé était arrivé. Oh, le beau baigneur ! Un vrai poupon était apparu comme par magie dans la maison. Et la belle poupée se retrouva au placard, tout au fond la belle princesse et ses accessoires, tous ses attributs et ses rêves. Fini la vie et la l'amour, commence le noir et la solitude. Adieu maman, bonjour panique.

Puis survint ce merveilleux revirement, cette guérison de maman. Elle était revenue chercher sa petite chérie, son adorée oubliée, perdue dans son cauchemar de poupon-blues. Elle a rouvert sa porte fermée à double tour, toute noire, et a fait jaillir la lumière sur sa petite fille toute jolie à nouveau, si blonde et aux yeux caves d'avoir tant pleuré, les joues creusées d'avoir eu si peur toute seule, ses bras amaigri d'avoir tant jeûné seule.

Alors, et seulement alors, maman se prit dans ses bras et se consola d'exister encore.

 

Rédigé par Morgazie

Publié dans #NOUVELLES, #ZODIAK CHALLENGE

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